La clé du succès de la French Fab

À l’heure où Bruno Le Maire souhaite encourager l’exportation de l’industrie française avec la French Fab, Arnaud Gobet, président du laboratoire pharmaceutique Innothera et ancien président du pôle de compétitivité Medicen Paris Région, plaide pour un soutien massif aux entreprises de taille intermédiaire. Objectif, développer les exportations et conquérir de nouveaux marchés.

Il n’y a pas de plus belle conquête que celle de partir à l’assaut de nouveaux territoires : la formule semble être parfaitement intégrée par Bruno Le Maire, à l’heure où la French Tech défraie la chronique au niveau mondial avec l’impressionnante présence des startup françaises au dernier CES de Las Vegas. Le ministre de l’Économie et des Finances se fait le chantre d’un nouveau mouvement, la French Fab, avec pour ambition de créer l’impulsion nécessaire pour notre industrie, résolument innovante.

Cet élan pour réindustrialiser la France en doublant le nombre d’ETI (Entreprises de Taille Intermédiaire) est aussi celui de créer un « Mittelstand » à la française, car derrière les enjeux digitaux et d’industrie 4.0, nous avons le devoir de réinvestir les marchés mondiaux.

Le potentiel des ETI pour l’international

Fer de lance du redressement productif national, nos 4 800 ETI pourraient être notre nouveau cheval de bataille. Leur force se nourrit d’abord dans le temps grâce à leur actionnariat familial, préservé sur plusieurs générations pour 80 % d’entre elles. Cette forme de gouvernance leur permet d’avoir de l’agilité dans leurs décisions stratégiques, tout en leur assurant une croissance constante.

Plus encore, nos ETI ont créé ces huit dernières années près de 400 000 emplois quand, dans le même temps, les micro et grandes entreprises en perdaient près de 200 000. Ce différentiel illustre à quel point la taille, la capacité d’innovation et la mobilisation des capitaux de nos ETI sont une force, et que leur potentiel de création d’emplois n’est plus de l’ordre de la conjecture… mais bien une réalité.

Les ETI, un cheval de Troie pour notre industrie à l’international ?

Le potentiel et la dynamique qu’elles créent nous amènent à repenser le statut de nos exportations. Elles ne sont plus la chasse gardée des grandes entreprises, et la taille des ETI est idéale pour partir à la conquête des marchés européens et mondiaux. Notons que les pays émergents constituent un formidable appel d’air afin que nos futurs champions se positionnent et diversifient leurs champs de compétence. Business France, dont la réputation rayonne déjà bien au-delà de nos frontières, l’a bien compris en étant l’un des moteurs qui accompagne les patrons des ETI dans cette aventure.

Outre-Rhin, le modèle d’exportation s’est appuyé sur une parfaite entraide entre les industriels et les grands groupes. Les champions des ETI allemandes se sont positionnés comme leaders sur des marchés de niche, par exemple avec les machines-outils et les cobots, redonnant toute sa légitimité à la maxime selon laquelle pour exporter efficacement, il ne s’agit pas d’être gros mais bien d’avoir un marché à sa taille.

Sagacité, proportionnalité et partenariat local doivent résonner dans l’esprit de nos dirigeants. En tant que président d’une ETI globalisée et fière de produire en France, j’ai pu constater que le corolaire d’une stratégie d’exportation réussie réside dans le choix d’un marché adapté à ses moyens, prérequis indispensable, auquel s’ajoutent le temps et l’humain.

Entreprises françaises, n’ayez pas peur de vous lancer à l’étranger !

À l’image de la nécessaire maturation d’un fruit, il est essentiel d’arriver au moment opportun sur un marché : suffisamment mûr pour l’export mais néanmoins épargné par l’afflux massif de concurrents. Quant à l’aspect humain, le partenariat local est déterminant. Ce relais sera une véritable figure de proue, maîtrisant les attentes du marché et des acteurs de terrain tout en incarnant l’esprit de l’entreprise qu’il représente.

Au même titre que les ETI, nos PME doivent être le fruit de toute notre attention. Elles constituent le nouveau vivier des futures ETI. Alors, encourageons leur développement et facilitons leur transformation. À ce titre, le « plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises » du gouvernement devra comporter des mesures concrètes pour accompagner cette transformation.
La French Fab semble donc annoncer une nouvelle ère pour le développement de notre industrie à l’international. Encore faudra-t-il stimuler l’essor de ces entreprises afin qu’elles aient les meilleures armes pour lutter dans un monde en perpétuel changement.

Arnaud Gobet
Président du groupe Innothera, cinquième laboratoire pharmaceutique français indépendant

Paru sur L’Usine Nouvelle le 24/03/2018